Interview de Rémi BOYER, DRH du groupe KORIAN
Pouvez-nous vous présenter votre groupe et les particularités de vos métiers ?
Le groupe Korian emploie 56 000 salariés en Europe dont 21000 en France. Nous avons plusieurs métiers : les maisons de retraites médicalisées, les cliniques spécialisées, les résidences et services de colocations et l’accompagnement et les soins à domicile. Autant vous dire que nous sommes très peu concernés par le télétravail puisque les deux tiers des salariés sont des soignants. Nos métiers reposent sur la relation et les liens que nous développons avec les personnes âgées pour les accompagner jusqu’à leur fin de vie. Seulement 3% de nos effectifs sont au Siège. Tous les métiers de première ligne sont sur site. Pour lutter contre la pandémie, nous avons mis en télétravail toutes les fonctions du siège et centrales.
La crise a montré combien il manquait en France des aides-soignants. Quels sont aujourd’hui vos besoins en compétences et comment les anticipez-vous ?
Nous avons 70 000 postes à pourvoir par an en France. Les métiers de la santé, en première ligne pendant la crise sanitaire, ont bénéficié d’une image « nobles » mais ils sont souvent peu valorisés et sont peu attractifs auprès des nouvelles générations. La crise a fait évolué les représentations et montré l’importance du personnel de soins et des infirmiers. Le système ne forme cependant que 20 000 aides-soignants par an et nous subissons une forte pression face à croissance démographique du secteur. Jusqu’à présent l’apprentissage n’existait pas dans notre secteur et démarre fort. La réforme Pénicaud porte ses fruits et faire mieux connaître nos métiers auprès des jeunes.
Il y a une compétition aujourd’hui effrénée entre tous les acteurs du soin. Nous diversifions donc notre recrutement. Nous vivons deux fléaux : le turnover et absentéisme. Nous devons travailler notre marque employeur pour attirer les talents puis les former.
Le service se développe et les services à domicile vont devenir une référence. Les métiers de proximité retrouvent leurs lettres de noblesse. La question est de savoir si ces métiers vont davantage attirer de nos jours car ils retrouvent une certaine lueur auprès de l’opinion publique.
De quelle manière les nouvelles technologies impactent-t-elles vos métiers aujourd’hui ?
La Silver Economy se développe avec l’apparition d’énormément de de start-up innovantes. Les technologies vont améliorer la relation avec les clients comme les tablettes par exemple qui peuvent faciliter le travail de soignants en leur offrant la possibilité de faire un reporting régulier des soins effectués aux patients. Cela permet d’améliorer les conditions de travail et aussi les conditions de suivi du patient. Le digital nous permet également de faire évoluer la formation . Nous proposons aujourd’hui des formules hybrides qui mixent la formation en salle avec des cours à distance. Nous avons lancé d’ailleurs notre Académie des métiers du soin et un centre digital de formation grâce à un studio connecté à Lyon. Cela va nous permettre de former directement les salariés sur leur site sans qu’ils n’aient besoin de se déplacer. On peut même travailler à distance sur la posture des salariés et les comportements pour assurer la santé et la sécurité des salariés au travail.
Nous entrons dans l’ère de la santé connectée. Le personnel va être doté d’outils et de support afin de mieux prendre en charge le soin. Les objets connectés vont prendre de l’ampleur et la domotique va aider les soignants pour toutes les manipulations des patients. Le distanciel va être dans la prise en charge en amont grâce à l’analyse de la Data.
L’internet des Objets (IoT) et la domotique avec la téléconsultation vont devenir les sujets dans les années à venir. La télémédecine se développe à toute vitesse. En santé on brase énormément de données et il va falloir mieux gérer la Data pour améliorer nos services. Le phygital arrive à toute vitesse pour les salariés et les résidents.
Propos recueillis par Christel Lambolez
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