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dimanche 28 avril 2024

Tendance marque employeur : nouvelles formes d’engagement, nouveau contrat social

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Le phénomène de grande démission outre-atlantique s’importe-t-il bien en France ? Les salariés sont-ils réellement désengagés ? Quel contrat social nouveau résulte des nouveaux modes de travail hybride ? Suffit-il de (re)travailler la raison d’être des entreprises et (re)donner vie par le jeu pour réengager les troupes ? La 1ère table ronde du [R]évolution RH Day [#RRHDay] cuvée 2022 a permis d’explorer quelques pistes de réflexion de spécialistes dans les domaines de l’entreprise, de l’armée et de la formation.

 

Comment expliquer la baisse d’engagement des salariés ? A l’occasion de la crise sanitaire, dans un temps record, sous la contrainte d’une force exogène à l’entreprise (le virus), le modèle et l’organisation du travail très contraints ont éclaté. Les salariés se sont rendu compte que ce qu’on leur vendait comme immuable ne l’était peut-être pas autant que cela.
Repenser le code du travail pour mieux répondre aux nouveaux critères d’engagement
500 000 démissions selon la Dares et, pourtant, Benoît Serres, DRH France groupe L’Oréal, « ne croit pas une seule seconde au phénomène de Grande Démission en France : 90 % des personnes parties ont retrouvé un emploi ; le contrat de travail en CDI reste l’incontournable. »

Selon lui, dans un débat sur l’engagement, il convient de se poser une question : « Pourquoi à chaque fois que le marché du travail va mieux, la première idée des personnes est de s’en aller ? ». Benoît Serres ne croit pas non plus que la nouvelle génération ne soit pas engagée. « Elle a une capacité d’engagement extrêmement forte. En revanche, son niveau de résilience est très bas. Dès que cela ne va pas, elle baisse les bras. » Rien n’est donc acquis. C’est la grande difficulté du sujet de l’engagement.
La réponse est plutôt à chercher du côté des critères d’engagement qui ont beaucoup changé. Pour ce DRH, il est vain de réguler la loi de l’offre et de la demande par une politique de rémunération uniquement. Ou par des tentatives sur le temps de travail à l’instar des débats actuels sur la semaine de 4 jours.
Il faut se donner le courage de relire le code du travail, que les pouvoirs publics s’en emparent. Il n’y a rien de plus dangereux que de régir le monde du travail par la jurisprudence.

Révéler dans votre entreprise les contributions positives au monde

Olivier Burger, DRH Worldline Group, est satisfait : son groupe spécialiste de la sécurisation des paiements a le vent en poupe. Il connaît une hypercroissance, est passé d’un rythme de croisière de 235 recrutements par mois à 500, avec dans le même temps une baisse de 10 % de son taux de démission, une politique diversité travaillée avec 0 discrimination positive et 40 % de recrutements de femmes, un pourcentage remarquable dans l’univers de la tech. Cerise sur le gâteau : aucune baisse d’engagement (64 % de personnes satisfaites).
Comment expliquer ces beaux résultats ? Grâce à une profonde réflexion, et à un travail collaboratif de longue haleine (26 workshops dans 27 pays), pour redonner du sens au travail et poser l’employee value proposition du groupe.
« Selon un sondage Watson, la première raison de l’augmentation de l’absentéisme des quadras est la perte de sens complet dans leur travail. Nous avons travaillé sur notre raison d’être, explique-t-il. Cela n’était pas évident de prime abord. Pour un premier camp, c’est la mort du capitalisme si vous commencez à mettre des sujets citoyens dans les sphères privées. Pour le second camp, c’est la mort du capitalisme aussi si on ne s’occupe pas de notre raison d’être : nous avons une empreinte écologique et ne pouvons l’ignorer. »
Pour Olivier Burger, c’est une question d’éthique. Signe des temps, l’élective est très demandée (autant que la finance…).
Petit cours du professeur : « L’éthique peut se décliner sur quatre niveaux : 1. Economique et technique (être viable, benchmarkable) ; 2. Juridico-organisationnel (conformité aux lois, qualité de vos organisations) ; 3. Qualité des comportements avec valeurs de votre entreprise ; 4. La raison d’être : pourquoi, pour quoi et pour qui je fais ce que je fais. »
En révélant dans votre entreprise les contributions positives au monde, vous redonnez de l’engagement, aux plus jeunes comme aux quadras. Paulo-Antonio Lopès, directeur groupe IGS, formation continue RH, insistera plus tard lors du débat sur l’importance de mettre en place la symétrie des attentions afin de remettre l’humain au cœur du projet de l’entreprise, notamment en améliorant l’expérience collaborateur et interrogera sur la façon de renforcer cette dimension à l’échelle d’une organisation complexe.

Miser sur la fidélisation de l’employé comme de sa famille

L’engagement est LE sujet de l’armée. « Avec 4 000 recrutements par an, nous devons toujours être dans l’incitation, avec deux mots-clés : fidélisation et engagement », martèle le colonel Vital Duschesne, commandant de la base aérienne et commandant de la base de défense de Tours.
Comment l’armée opère-t-elle concrètement sur l’engagement ? par le sens et la finalité de leur mission, ainsi que par le concept de grande famille : « Dans les armées, tous ne sont pas pilotes, nous avons plus de 50 métiers, explique-t-il. Les métiers changent et évoluent. Mais tous ont une finalité : défendre la France et les Français. Notre entreprise est énormément dans le compagnonnage. Nous nous formons beaucoup à l’intérieur. » L’engagement, l’armée va le chercher dans cette capacité de leurs recrues à s’investir au-delà des heures ouvrables : « Nous voulons faire passer le message : Chez nous, tout est possible, mais vous allez transpirer. On se paie par l’engagement et le sens que l’on donne. Après, je le constate, cet engagement a tendance à se perdre ». Pour le colonel, l’engagement est à retrouver par la fidélisation pris dans un sens très large, peut-être à rechercher du côté du giron familial : « Mme Florence Parly [ministre des armées] est partie du principe que pour fidéliser un militaire, il faut fidéliser sa famille. Cela a considérablement catalysé l’engagement ».

Miser sur l’engagement intrinsèque pour que chacun réalise son chef-d’œuvre personnel

Pour Laurent Choain, DRH du groupe Mazars, le danger n’est pas tant la grande démission que la grande résignation : « La notion de désengagement ne se traduit pas toujours par une démission. Les personnes qui ne disent rien et restent, ce n’est pas forcément de la loyauté. Cela peut être de la fatigue. Ils sont démobilisés intellectuellement. »
Pourquoi faudrait-il, selon ce DRH engagé, trouver une cause absolument extrinsèque [environnemental, citoyen…] à l’entreprise pour qu’il y ait réel engagement ? « Nous croyons que l’essentiel de l’engagement est le déclenchement intrinsèque. Nous voulons créer des conditions pour de vraies amitiés professionnelles, « des amis pour la vie » et ce n’est pas de la socialisation ; nous voulons développer leur employabilité pour la vie et leur permettre d’avoir une chance d’être leur chef-d’œuvre personnel. » Une dernière notion essentielle pour Mazars, primo-employeur (avec 95 % de jeunes dans leur recrutement) n’ayant pas vocation à fidéliser sur le long terme. « Nous avons supprimé la clause d’exclusivité chez Mazars. Son aventure, je ne la maîtrise pas. »

Et si nous considérions également l’engagement de l’entreprise vis-à-vis de ses salariés ?

Misons sur le principe de réciprocité. Pour les protagonistes présents à la table ronde, l’engagement se résume dans la promesse tenue et ils nous éclairent tous sur les engagements que l’entreprise doit également tenir.
Véronique Montanat, directrice marketing communication et prospective RH à Sopra HR Software, évoque la notion d’entreprise étendue : « Cela nécessite un engagement sur toute la chaîne de valeurs, avec un accompagnement humain de tous. » A l’heure où une entreprise sur deux a des difficultés de recrutement, les questions se posent sur le sens et le collectif : « Les entreprises travaillent l’attractivité, elles investissent la RSE, le CARE, les offres de service sur modalités de travail. Mais est-ce la vraie mission de l’entreprise ? Ne fait-on pas trop de surenchère ? Comment répondre à l’individu tout en ayant le souci du collectif ? ».
Bornons donc le périmètre d’action de l’entreprise. Mais pas que.
Développons la qualité au travail en expliquant la chaîne de valeur. La qualité de l’engagement passe par une explication sur l’utilité certaine et objective du travail de tout un chacun, à chaque niveau de la chaîne, en montrant que chaque maillon est essentiel. Cela signifie travailler à diminuer le sentiment de l’employé d’être remplaçable à tout moment. Ainsi que d’apporter davantage d’attention à donner un cadre professionnel et une autonomie.
Définissons-nous comme des employeurs investisseurs (qui vont les faire grandir) et non pas consommateurs.
Faisons en sorte que les valeurs se déclinent réellement en performances observables sur le terrain.
Développons la capacité de résilience en les invitant à la prise d’initiative, à l’innovation, à la prise de risques.
Garantissons enfin la promesse faite au collaborateur.
Et faisons mentir l’adage « les promesses n’engagent que ceux qui y croient ».

 

Pascale Kroll

 

*L’événement #RRHDay pour [R]évolution RH est la manifestation annuelle du média JOBSFERIC. 200 décideurs RH & formation inscrits pour cette 5e édition.

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