Il devrait aussi se rapprocher des managers pour mieux comprendre leurs besoins de recrutement
Le métier de sourceur en tant que tel, c’est-à-dire chargé uniquement de chasser les candidats potentiels et de les aborder, n’est apparu que sur le tard. « Avant, on n’était pas censé évoluer en tant que sourceur, explique Laurent Brouat, CEO de l’École de recrutement. Aujourd’hui, c’est un vrai métier d’expertise. La tendance est de devenir consultant. » Selon le spécialiste, la demande est beaucoup plus forte qu’il y a deux ou trois ans, et le métier est de plus en plus en tension. Christophe Barré, DRH à l’OPPBTP (Organisme professionnel de prévention du bâtiment et des travaux publics) a dû recourir à une sourceuse pour répondre à une importante demande de recrutement. Le manque de candidats qui se présentent spontanément explique en partie ce choix et cette réalité devrait se confirmer à l’avenir. « On ne reviendra pas à un marché où les candidats se pressent à notre porte », estime-t-il. Le sourceur devient donc essentiel. Mais sa valeur ajoutée ne se limite pas à repérer les bons candidats : savoir les séduire fera la différence. « Il y a encore beaucoup de choses à faire en matière de marque employeur et je pense que le sourceur de demain devra davantage prendre en charge ce travail » poursuit Christophe Barré.
Le recrutement comme transaction
Si pour certains, la fonction reste toujours rattachée aux ressources humaines, un autre courant estime d’ailleurs que le sourcing devient un métier à part entière. Laurent Kermel, dirigeant Hubistaff et cofondateur d’Admyjob, des sociétés de conseil en RH, considère par exemple que la dimension marketing du métier, si elle existe déjà, est appelée à se développer. « La connaissance de tous les écosystèmes marketing, comme la communication, la capacité à s’exprimer à l’écrit peut être utile au sourceur, estime-t-il. Il devra de plus en plus savoir rédiger des offres en utilisant les techniques du story telling, par exemple. Il devra les mettre en valeur par le biais de compétences marketing. » Selon le dirigeant, le recrutement pourrait d’ailleurs être pensé comme une transaction. « Le site Internet pour recruter pourra être orienté comme un site marchand, avec un pilotage de sa performance. »
Le sourceur devra aussi accentuer sa capacité à identifier des potentiels plus que des profils déterminés. « Quand on recrute une personne pour un métier donné, il faut garder à l’esprit que cette personne ne fera pas le même métier toute sa vie, poursuit Laurent Kermel. Il faut donc être à même de recruter des gens capables de s’adapter à différents environnements ou de changer de métiers, plus que maîtrisant des compétences techniques. »
Selon Jean-Marie Caillaud, fondateur du cabinet de conseil WorkMeTender, les entreprises pourraient aussi se constituer des équipes de sourceurs en relation avec un manager. « Il pourrait y avoir un département talent acquisition dédié à la recherche, un autre consacré à l’engagement collaborateur, un autre à la marque employeur… et toutes ces pratiques seraient travaillées conjointement au sein d’une même équipe. »
Retour sur le terrain
Les sourceurs de demain pourraient aussi se détacher de la technologie pour se concentrer sur la valeur ajoutée, notamment sur les liens avec les managers métiers, pour comprendre leurs besoins. « Les sourceurs devront passer plus de temps avec eux pour connaître les types de critères à prendre en compte dans leur machine à sourcer », estime Laurent Brouat. Christophe Barré abonde dans ce sens : « Les recruteurs en général devront avoir une connaissance plus intime du terrain et des métiers, et ce sera de plus en plus important dans le sourcing. » Jean-Marie Caillaud estime d’ailleurs que le sourceur de demain devra justement aller rencontrer directement les professionnels, sur des salons professionnels, par exemple. « C’est une méthode qui va à l’encontre des pratiques digitales mais qui permet de repérer des compétences spécifiques comme des développeurs dans une technologie précise. Cela demande un effort particulier, mais les candidats sont très sollicités en ligne. Cela permet de prendre le contre-pied des pratiques digitales. »
Chloé Goudenhooft