Autrefois déprécié, le sourcing prend ses lettres de noblesse
Le sourcing n’est pas simple : détecter la perle rare au sein d’une masse d’actifs qui ne se considèrent pas comme candidats… Mais ce n’est pas tout. Il faut ensuite entrer en contact avec la personne identifiée et la convaincre de s’intéresser au poste offert par une entreprise souvent concurrente de celle où ce professionnel travaille actuellement. Pour repérer ces personnes, le sourceur recourt à différents canaux, dont les réseaux sociaux professionnels. La maîtrise des techniques digitales est donc incontournable. Par son analyse du marché, il doit pré-qualifier des candidats et valider a priori leur potentiel. Le sourceur « pur » s’arrête à cette phase du recrutement. « Il ne va pas jusqu’à l’entretien physique, précise Laurent Kermel, dirigeant Hubistaff et cofondateur d’Admyjob, des sociétés de conseil en RH. Néanmoins, il doit donc avoir la capacité à générer du désir chez les personnes contactées. Le désir de poursuivre le processus de recrutement… Il y a une dimension marketing très forte dans le sourcing. »
Un poste qui prend du poids
La fonction était d’abord une des composantes du poste de chargé de recrutement. Depuis, elle s’est transformée en métier à part entière. Le déploiement des outils digitaux dans les ressources humaines a contribué à cette transformation, un processus qui s’est accéléré il y a environ cinq ans. L’autre facteur qui pousse les entreprises à recruter des sourceurs, c’est bien sûr la guerre des talents et la transformation du marché du travail. Christophe Barré, DRH à l’OPPBTP (Organisme professionnel de prévention du bâtiment et des travaux publics) a dû recruter une sourceuse pour faire face à de nouveaux besoins. « En ce moment, je dois embaucher sur 40 à 50 postes, c’est colossal ! Pendant longtemps, les candidats venaient à nous naturellement, mais ce n’est plus le cas. Et alors que le métier de préventeur n’existait quasiment pas, aujourd’hui, il y a possibilité de faire carrière dans des entreprises, d’où le besoin d’un sourceur pour chercher des candidats et faire connaître notre marque employeur. » Le poste est pour l’instant en CDD, mais la question de sa pérennisation devrait se poser.
Laurent Kermel explique aussi que le poste de sourceur a souvent servi de porte d’entrée dans une carrière de recrutement. « Il rassemble les tâches qui s’effectuent en amont, et qui n’étaient pas considérées comme les plus nobles, détaille-t-il. Le poste prend désormais plus de poids. » Le marché du sourcing est d’ailleurs lui-même en tension. « Trouver des sourceurs efficaces, c’est difficile, confirme Jean-Marie Caillaud, fondateur du cabinet de conseil WorkMeTender. La tension du marché s’est répercutée sur le marché des recruteurs. La compétence en sourcing est prédominante, alors qu’avant, elle était reléguée au stagiaire ou à des prestataires externes. Ce n’était pas le métier le plus noble. »
Le sourcing décorrélé du recrutement
Aujourd’hui, le métier émerge en entreprise mais surtout dans les sociétés qui ont un gros volume de recrutements. Le salaire tourne alors entre 30 000 à 45 000 euros. « A ce fixe moyen, s’ajoute des primes et des bonus en fonction de la réussite, précise Laurent Brouat, CEO de l’École du recrutement. « Les sourceurs sont aussi présent chez les intermédiaires du marché, comme les cabinets de recrutement ou les entreprises de travail temporaire », nuance Laurent Kermel. Selon le spécialiste, certains acteurs vont d’ailleurs décorréler le sourcing du processus global pour apporter de la valeur à leur travail : « nous faisons le sourcing pour vous, vous gardez le recrutement. » Laurent Brouat estime quant à lui que les start-up, au sens propre du terme, recourent aussi à des sourceurs car elles emploient sur des métiers en tension et en croissance.
Chloé Goudenhooft