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mardi 6 juin 2023

Leadership et spiritualité : vont-ils de pair ?

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Trois ans de recherche et d’analyse ont conduit Catherine Voynnet-Fourboul, directrice de l’Executive Master du Ciffop et maître de conférences à l’université Panthéon-Assas Paris II, à identifier des patrons exemplaires. Son ouvrage « Diriger avec son âme. Leadership et spiritualité » vient de paraître aux éditions EMS Management & Société.

 

 

Comment vous est venue l’idée de traiter la spiritualité en entreprise ?

 

 

Lors de mes missions au sein des différentes organisations, j’ai constaté que les comportements des individus variaient en fonction de la façon dont ils étaient dirigés. Cela m’a permis d’identifier les méthodes de leadership utilisées et de rencontrer des personnalités exceptionnelles à la tête de certaines entreprises. Le PDG ou les cadres dirigeants ont une forte influence sur les cadres. Ce sont eux qui donnent la note.  

J’ai réalisé la plus grande partie de mes entretiens de 2008 à 2011 et cela m’a permis de côtoyer des personnalités incroyables qui avaient su dépasser les épreuves rencontrées sur leur chemin afin de développer un leadership hors du commun. Dans un premier temps, mon approche a été de les questionner sur leur propre définition de la spiritualité et sur les vertus que doit, selon eux, posséder un dirigeant.

Il existe plusieurs niveaux de leadership : matériel, émotionnel, mental et spirituel.  Mon analyse inductive m’a fait comprendre qu’un leader était une personne qui avait su surmonter une épreuve. Les épreuves sont identifiées et variées. Le cadre doit par exemple faire face à un mauvais superviseur, affronter un échec, s’adapter à une situation interculturelle, ou tout simplement être amené à sortir de sa zone de confort.

 

 

Qu’en est-il de la perception des personnes interrogées sur le sujet ?

 

 

Les collaborateurs sont intéressés par la spiritualité et il existe une réelle appétence à son propos. Cependant, il ne s’agit pas d’un sujet facile à aborder car la spiritualité est souvent associée aux religions et à des croyances rationnelles. L’entreprise ne s’autorise pas, par conséquent, à investir ce champ. Pourtant, mon travail m’a amené à faire beaucoup de médiation entre les directions générales et les syndicats. Je me suis rendue compte alors qu’il fallait souvent recourir à des qualités spirituelles pour résoudre les conflits. Tout le monde n’est pas d’accord pour utiliser le mot « spiritualité », qui suscite de la méfiance et fait peur. Bien sûr, il faut faire attention aux dérives sectaires. De manière générale, les gens sont plus à l’aise avec le terme « bienveillance », qui se situe pourtant déjà à un niveau spirituel.

 

 

Qu’attendez-vous de vos recherches aujourd’hui ?

 

 

Le but est de populariser l’idée que l’entreprise peut s’intéresser à la spiritualité en matière de leadership en sortant des comportements rationnels établis. La spiritualité nous est utile et précieuse. L’Occident a connu sa réussite grâce à la rationalité du Siècle des Lumières qui a encouragé la science pour accéder aux connaissances. Il est difficile de nos jours de penser autrement. Or, à l’heure actuelle l’entreprise vit une période de déverticalisation hiérarchique. La transmission de l’information, qui jusqu’à présent était garante de la hiérarchie verticale, s’ouvre. Les schémas traditionnels explosent grâce à une interconnectivité croissante. Le leadership classique en a souffert et a évolué petit à petit vers un leadership transactionnel, puis transformationnel (bâti sur la reconnaissance des collaborateurs) et enfin spirituel. Le leader spirituel est capable de « se mettre de côté » pour faire grandir les autres. Nous constatons aujourd’hui que les individus aspirent à une forme de bonheur, à une dignité. La dimension spirituelle de l’entreprise devient inévitable.

 

 

Comment, concrètement, les chefs d’entreprise peuvent-ils mettre en place cette dimension spirituelle au sein de leur organisation ?

 

 

Pour l’instant, j’accompagne les entreprises sur leurs valeurs en utilisant l’outil de Richard Barrett qui concilie une approche individuelle et organisationnelle. Le questionnaire interroge sur une centaine de valeurs et débouche sur plusieurs niveaux d’analyse. Il permet de se faire une idée de l’orientation de la structure sur les plans matériel, émotionnel et mental. Par exemple, le niveau 3 sera révélateur d’un souci de performance et d’excellence tandis que le niveau 5 constate une capacité à lâcher prise et à créer, que l’on retrouve souvent chez les cadres qui encouragent la cohésion interne et la confiance. Au niveau 7, le plus haut niveau, le leader possède sa propre vision, est devenu humble et sage. Le même processus existe pour les valeurs organisationnelles et, on aboutit ainsi à une pyramide de perception de l’organisation.

Quand on les interroge, les collaborateurs espèrent toujours accéder à des valeurs de plus haut niveau pour faire évoluer les organisations et on les oriente pour qu’ils puissent contribuer à une amélioration globale. Voilà le but final.

 

 

Propos recueillis par Christel Lambolez

 

 

 

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