Le Prix de l’Hu.Mour RH, contraction des mots « HUMilité » et « aMOUR », du Club DéciDRH a été remis à Dominique Bellos. Parcours d’une DRH hors-norme.
Tout est possible. Tel est le leitmotiv de la première femme à entrer au comité de direction et au comité opérationnel du groupe Hutchinson, un des plus grands équipementiers de l’automobile et de l’aéronautique (3,3 Md€ de CA monde et 38 000 salariés). Le parcours de Dominique Bellos, directrice des ressources humaines et de la communication, est atypique. Destinée à être enseignante, elle a atterri dans la fonction RH par hasard et a gravi les échelons grâce à son expérience du terrain. « On est tous unique au monde et on aime bien que les autres le sachent. Aussi, le manager doit-il connaître parfaitement ses collaborateurs et les aider à grandir vers ce qu’ils sont, pour au final, les rendre heureux», affirme-t-elle par conséquent aujourd’hui.
Son instinct, sa passion et sa volonté l’ont conduite à des postes aux responsabilités de plus en plus élargies. Toujours dans la précision, le travail, et épaulée par sa famille, elle a avancé sur son chemin en remettant régulièrement en question son savoir et ses compétences et en relevant de nombreux défis. Entrée par la petite porte comme secrétaire de direction, il était en effet fort peu probable qu’elle figure aujourd’hui parmi les personnalités du Who’s Who. «Jeune femme, je m’imaginais devenir mère de famille et professeur de langues. J’ai fait mes premières armes dans l’Industrie à Genève en tant que secrétaire au sein du groupe Ciba-Geigy. Je suis ensuite revenue en France pour travailler comme assistante de direction au sein de la filiale du groupe Vogelsang», raconte-t-elle. Dix-sept ans plus tard, on la nommait au poste de directrice générale alors qu’elle n’avait qu’une maîtrise d’Allemand en poche. Elle explique : «Je me suis révélée être une redoutable négociatrice.» Ambitieuse et passionnée, elle comprend très vite les astuces psychologiques pour réussir une vente. Lorsque le directeur commercial de l’entreprise quitte son poste, la direction lui propose naturellement de le remplacer. Ses performances la conduisent tout droit vers la direction générale. «En tant que directrice commerciale, j’ai dû affronter un milieu très concurrentiel et négocier en direct avec les grands acteurs de la distribution. J’avais mis en place un système de rémunération motivant, poursuit-elle, Nous avons cependant dû faire face à des prémisses de grève et nous avons réglé le problème rapidement en interne avant d’en référer à la direction, ce qui m’a valu le poste de directrice générale de la filiale. J’ai tout de même repris mes études pour obtenir le CPA à l’époque, devenu le MBA, afin de posséder le label qualité de direction générale.»
Un grand défi RH : accompagner les mutations des métiers
En 1997, elle est recrutée par le groupe Hutchinson qui cherchait son directeur général pour une business unit. Sa mission a été principalement d’accompagner l’évolution des métiers et donc des compétences pour affronter les bouleversements actuels de son industrie. «La notion de mobilité n’est pas aisée chez les cadres français et encore moins au sein de la population ouvrière. Cela exige d’avoir un projet de vie professionnelle, voire un projet de vie tout simplement, argumente-t-elle. La personne doit se sentir à l’aise dans son entreprise et doit pouvoir être accompagnée au moment où elle en a le plus besoin, essentiellement grâce à une relation « customisée » avec son manager. Le groupe a connu de nombreuses crises en 163 ans d’existence et a toujours su s’adapter. La clé de l’adaptation est la transmission des savoirs notamment par le tutorat. Nous sommes entrés dans une grande transformation depuis près de huit ans qui s’appuie sur la formation et le « lean manufacturing » afin d’optimiser nos processus. Cela peut être perçu comme un rouleau compresseur si nous ne faisons pas assez attention aux limites des individus pour fournir les efforts nécessaires à la réduction des gaspillages, des coûts et des temps de cycle. Nos effectifs, de l’ordre de 38 000 personnes, ne cessent d’augmenter (de 5 à 8% par an ) pour accompagner notre croissance. La plupart de nos métiers sont des métiers de précision, donc ils restent manuels. La révolution technologique nous pousse par ailleurs vers davantage d’innovation et nous avons ouvert notre Smart Plant, l’usine intelligente, près de Détroit avec une gestion numérique optimisée. Il faut anticiper les futurs métiers et la fonction RH se doit d’accompagner les opérationnels pour réaliser ces projections en amont.»
Insuffler l’esprit de conquête en interne
Un grand projet d’entreprise a été lancé il y a quatre ans supportant la marque employeur avec force et cohérence. Des valeurs que porte Dominique Bellos depuis toujours ont été mises en avant : l’enthousiasme, l’excellence, le goût des défis, la transmission et l’humain. «L’innovation coule dans nos veines et nous contribuons en étroite collaboration avec les constructeurs à élaborer les produits de demain. Notre volonté est de donner de plus en plus d’autonomie à nos opérateurs pour que, peu à peu, ils prennent la responsabilité de gérer un processus de A à Z. Mon rôle de DRH a fortement évolué car aujourd’hui nous devons garantir aux salariés un épanouissement professionnel», assure-t-elle.
Afin que chacun se sente acteur du changement, Dominique Bellos use plus que jamais de ses atouts de leader pour insuffler un esprit de conquête, toujours dans la bonne humeur et l’enthousiasme. Un pari humain, collectif, pour faire face aux enjeux actuels de métamorphose du monde de l’industrie et, sans nul doute, son plus fort challenge.
Christel Lambolez